dimanche 16 novembre 2008

feuille épinglée(1)



Elle était là comme suspendue au dessus de cet édifice blanc au toit d’ardoises grises, la nuit, elle énorme sphère de sable traversée d’un doigt passant en forme de sourire, bienveillante, imposante et si complice, me connaissant depuis la nuit des temps.
Je me sentais aussi vieille et aussi jeune qu’elle, j’avais ma place sur la terre, elle dans le ciel muette des mots d’ici ; et pourtant elle savait, elle qui voyait tout, et l’amour, là-bas tout au bout, aux portes de cette autre mer.
Aujourd’hui je suis triste, infiniment triste, je dépose mes rêves, la lune n’est plus mon amie, elle n’est plus personne, mes mots n’ont plus rien à faire d’autre que de se taire et mes yeux se porter à l’horizon de mes monts noirs qu’ils n’auraient jamais du quitter.
Je suis en perte d’écriture, je chute de nuage en nuage, de cirrus en cirrocumulus jusqu’à ce qu’enfin il se mette à pleuvoir pour m’amortir plume du vent dans la flaque de l’encre du temps.
En tombant j’éclabousserai d’une neige d’étoiles, les flocons de la brume désespérante qui m’entoure, qui m’étreint et m’enserre dans ce que j’ai de plus cher : le souffle de la vie.
Je n’aurai plus alors qu’à me relever un peu détrempée, un peu sonnée, un peu oublieuse du passé, l’âme en lavis de transparence à recouvrir d’une nouvelle écriture, toujours la même mais avec un peu moins d’azur, toujours un peu moins jusqu’à ce jour où tout s’écrira blanc sur blanc et que je n’aurai plus rien à dire que de parler au vent mon père qui m’a vu naître et qui me verra disparaître petit courant d’air échappé du monde de l’ordinaire.

Ensuite ou avant ce moment, je ne sais plus très bien à présent, je serai chat pour complètement changer de vie, un chat poisson avec une cour de sirènes à se faire coucher les sardines en boîte comme dans le petit poucinet, sauf que la boîte serait l’univers de mes phantasmes, vieille survivance de temps révolus ou il neigeait plus d’étoiles entre les draps froids de l’insomnie que toute une éternité d’hivers en Sibérie…
Avec parcimonie, je m’accorderai chastement des battements de cils de volupté repue entre deux impromptus à ciel ouvert…juste pour écrire en lacérant d’une griffe la mer devenue plate pour qu’elle se réveille aux abysses de mon profond tourment.
Oui… je serai un chat capricieux.
Comme la vengeance d’avoir dans une autre vie tout perdu d’un battement de cils, je ferai la lune et le soleil juste en me pinçant de l’intérieur la joue.
Je serai un chat de pure cruauté aux fourrures de l’amour exacerbé miaulant jour après jour tous les mots tus depuis tant d’années...
*Edit du vingt : Âme sensible ne cliquez pas ici.

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