jeudi 13 septembre 2007

histoire de passion rouge 1

Je vais arrêter de me faire souffrir, de me souvenir, de me faire des reproches, de toujours culpabiliser, d’endosser des fautes qui ne sont pas les miennes, de les couvrir en réparant les erreurs de parcours pour qu’elles deviennent invisibles…mais pas pour moi.
Il faut que je baisse les bras, que je me laisse prendre par les imperfections de la vie, cesser le combat parce que je n’ai vraiment pas l’âme d’une guerrière.
Je vais me plaire, accepter mon image de travers et cette saleté sans nom qui me pourrit la vie, je vais l’arborer…non mieux ! je vais l’ignorer et je serai sourde aux questions ou alors je dirai : « ah ! bof…c’est rien du tout. »
Je vais m’acheter un poisson rouge et je lui raconterai des histoires de poissons rouges, ou des chaussures rouges, ou une grand-mère rouge, ou un livre sur les peaux-rouges, une passion qui m’exilerait de moi. Mais ça ne s’achète pas une passion, ça te tombe sur la tête, dans les yeux, dans la peau, ça éclabousse tout dans ta vie et ça repeint le monde.
J’en ai eu des passions mais ce n’était jamais la bonne, celle qui ne te quittera jamais, pas même dans la tombe. Je vais me passionner de moi, au moins je ne serai plus jamais seule…je souris…je crois que je vais écrire une histoire de poisson rouge.
Il était une fois une fille qui n’en croyait pas ses yeux, ni tous ce qui faisait qu’elle était elle à travers la vision déformée du bocal dans lequel on l’avait enfermée.
Alors elle faisait des bulles et des bulles, des tourbillons de bulles pour en faire des ballets-spirales dans lesquels elle se laissait emporter, vriller, tourner sur elle-même à la pointe des pieds, petite danseuse verticale, à s’élever chaque jour davantage jusqu’à sortir la tête de l’eau et respirer cet air nouveau.
Un matin, un rayon de soleil vint à passer, traversant la surface et l’irisant de reflets dorés, le petit poisson caché parmi les cailloux blancs et les algues synthétiques, épuisé d’oxygène, d’avoir fait souffrir ses faibles branchies pour le rêve d’appartenir au monde des soupirs, sentit à travers ses écailles la surprise d’être appelé par la chaleur de la lumière.
Elle s’enlaça le long du rayon, les nageoires jointes en prière que ce fut enfin la solution pour atteindre le plus profond de ses désirs. Le rayon accroché à la roue, pale du moulin de l’univers solaire, lentement la sortit de l’aquatique sphère.
Des champs de tulipes à l’infini s’étalaient, rectangles-couleurs de la vision mosaïque de la nature humaine. Et c’est là, sous le niveau de la mer qu’elle fit ses premiers pas dans la vie. Dans un champ de tulipes rouges, à courir entre les fleurs, à s’enivrer de l’humidité marine, à écouter le soir venu, les belles rouges se parler, et à les apprendre. Et de fleur en fleur le petit poisson rouge découvrit le bonheur, les souvenirs et surtout de leur passé appartenir.
Un matin, lové dans un calice de rosée en délice, baignée d’un rêve merveilleux, elle ressentit à travers ces écailles devenues douces comme des pétales, de nouveau l’étrange chaleur de la lumière. Ouvrant les yeux, elle vit apparaître dans le ciel bleu, un petit poisson rouge glissant le long « du » rayon. Vite, elle tomba des étamines et se précipita…hélas…dans l’immensité de ce plat pays, l’horizon était si court qu’elle ne put voir où ,ce que tout de suite elle avait perçu comme son double aimé, était tombé.
Les tulipes : «Il te faudrait bien plus d’une vie de poisson rouge pour la retrouver. »
Mais elle n’écouta pas et sa vie se fit enfer de recherches épuisantes et vaines, elle usa ses plus belles années jusqu’au jour où n’en pouvant plus, elle regagna son champs de tulipes rouges.
La vie reprit calme et paisible.
Le petit poisson rouge se présenta à l’élection du plus gentil des petits  poissons rouges dans le champ de tulipes rouges et fut élu à l’unanimité, étant le seul, pour le représenter dans le monde entier. Ce furent les honneurs et la reconnaissance…les voyages…et une nuit au bord de la mer rouge, elle fut ainsi réveillée :
 
« Pêche à la liiigne
Pêche sardiiine
C’est moby qui dîne
C’est moby qui dîne
Pêche coquiiine
Pêche à l'usiiine
C’est moby qui dîne
C’est moby qui dîne
Pêche voiiisine
Pêche assassiiine
C’est moby qui dîne
C’est moby qui dîne
 
Pêche d'origiiine…. »
 
Aux mots de la langue qui l’avait vue naître. Elle sortit la longue vue : un petit poisson rouge sur une coque verte chantant à tue tête. Son cœur fit 36 000 tours…c’était elle.  
Or ce n’était pas le jour et aucun secours n’était à attendre du soleil, quant à la lune elle affichait le sourire moqueur de la plus cruelle des nuits. Les tulipes étaient restées au pays et la ligne rouge main dans la main arriverait bien trop tard le lendemain pour traverser le rêve jusqu’à la réalité.
Tristesse de ce petit poisson qui ne savait plus nager, tristesse de se demander si réellement il avait pu un jour dans ce bocal apprendre les forces de la vague…et la voix s’éloignait, et les paroles et les tulipes :
Le chœur des tulipes « et si tu étais arrivée à la fin de ta vie de poisson rouge, et si tu étais bien plus qu’un poisson rouge, et si tu étais ce que tu n’as jamais connu…et si tu étais…et si tu étais… »
 
Alors ?
 
Le petit poisson rouge a couru sur la plage comme entouré de toutes ses fleurs amies qui l’encourageaient des frôlements de leurs pensées. Et c’est à l’aube qu’enfin il atteignit le rivage et fut emporté par la première vague de sa vie…
 
« Pêche à la liiigne
Pêche sardiiine
C’est moby qui dîne
C’est moby qui dîne
Pêche coquiiine
Pêche à l'usiiine
C’est moby qui dîne
C’est moby qui dîne
Pêche voiiisine
Pêche assassiiine
C’est moby qui dîne
C’est moby qui dîne
 
Pêche d'origiiine…. »

2 commentaires:

  1. Tant mieux Bettina...je ne sais pas si tu as lu la suite des aventures. Mais de toute façon j'ai adoré tout écrire.

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